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La taille définitive du bambou

La taille: rabot, lime et racloir

Après avoir utilisé de façon exclusive l’un ou l’autre des procédés de taille, je suis finalement arrivé à poser le problème non plus en terme de choix, mais de complémentarité.

Le rabot

Il a pour lui d’être, apparemment, l’outil qui permet d’aller le plus vite, mais il ne permet pas, à mon point de vue, une finition assez précise. En effet le brin de bambou n’est pas maintenu suffisamment au fond de la gorge du gabarit, et on court sans cesse le risque que, le brin se soulevant au passage du rabot, on dépasse la valeur du profil. Si un tel accident arrive, il n’y a pas d’autre solution que de faire avancer le brin « vers le haut » jusqu’à ce que le « trop raboté » affleure. Mais cela implique que le brin soit nettement plus long que nécessaire d’une part, et de l’autre qu’on fasse de même pour tous les brins, afin de respecter le tierçage.

D’autre part, la taille au rabot présuppose que ce dernier soit constamment affûté. En ce qui concerne ce problème précis, et dans la mesure où je ne maîtrise pas bien son utilisation, j’ai pris l’habitude d’affûter seulement le centre de la lame, les deux côtés étant arrondis.

Quoi qu’il en soit, je n’utilise plus le rabot que pour le dégrossissage et l’approche du profil.

La lime

Une lime à métaux, demi-douce, convient parfaitement. Il est toutefois utile de vérifier sa rectitude hori­zontale au moment de l’achat. Au bout de cette lime est ligaturée une cale en bois de l’épaisseur exacte du gabarit: ainsi la lime travaille bien à l’horizontale et ne risque pas d’attaquer le gabarit.

la lime dans la construction d une canne a peche en bambou refendu

Quoique la taille à la lime soit plus longue (relativement) que la taille au rabot, elle a pour elle plusieurs avantages. En premier lieu, la pression exercée sur la lime fait que le brin est bien maintenu au fond de la gorge du gabarit, ce qui est important au niveau du respect de la cote du profil.

En second lieu, entaillant transversalement les fibres du bambou, elle permet d’attaquer en des points très précis, par exemple au niveau des noeuds, lesquels sont toujours plus difficiles à attaquer au rabot, qui, en venant buter sur le noeud, a tendance à soulever le brin et à surcreuser juste devant le noeud.
A cet égard, la lime est le meilleur outil pour la taille au niveau des noeuds. C’est aussi celui avec lequel on ne court pas le risque de voir le brin glisser à l’intérieur de la gorge.

La taille à la lime a toutefois un défaut, qui apparaît surtout lorsqu’il y a beaucoup de bambou à enlever: le "porte-à-faux" important provoque des arrachements de fibres.
Ce n’est pas gênant quand il s’agit de la pointe opposée à l’écorce, mais c’est épouvantable quand cela se produit du côté de l’écorce.

Le pire, c’est qu’on ne le voit pas toujours, et seule la colle le révèle par un trait plus sombre. Mais c’est trop tard: le brin fait partie de l’élé­ment collé. Aussi est-il toujours utile de contrôler un brin en l’installant, après taille, à nouveau dans la gorge du gabarit, mais avec la face de l’écorce au-dessus. On voit alors apparaître nettement d’éventuels défauts.

Le racloir

Le terme « racloir » n’est sans doute pas parfaitement approprié, car tous ceux qui travaillent le bois savent que le terme de racloir recouvre un type d’outil précis; mais je n’en vois pas d’autre, d’autant que les outils dont il est question plus loin partent du même principe, mais ne possèdent pas de « morfil »

le racloir dans la construction d une canne a peche en bambou refendu

J’utilise deux genres de racloirs: le premier est un outil de tournage sur métaux, lame mince servant à tron­çonner. J’en possède en acier rapide et en carbure plein. Ils me servent à affiner après une première approche à la lime.

La lame d’outil à tronçonner donne un véritable copeau de bois. L’avantage est dans la finesse et la précision d’une telle finition, à condition toutefois de bien main­tenir le brin en fond de gorge, afin de ne pas tomber dans le défaut inhérent à la taille au rabot (risque de dépasse­ment de la cote du profil).

Pour les pointes de scion très fines (épaisseurs de brin de l’ordre de 0,6 à 1 millimètre) on veillera à ne pas risquer de casser le brin en forçant sur l’angle d’attaque du racloir

 

La technique de taille

Je procède de la façon suivante: l'ébauche triangulaire est installée, avancée de 20 centimètres seulement dans le gabarit, et fixée au talon du gabarit par un serre-joint, avec une cale de bois pour protéger l' ébauche.
Une fois cette opération terminée, l'ébauche est avancée de 10 centimètres après avoir été retournée, et on recommence sur 30 centimètres cette fois et ainsi de suite jusqu'à ce que le brin arrive à l'endroit où s'achève le réglage en tête du gabarit.

De retournement en retournement, en enlevant des quantités égales de chaque côté du brin qu'on taille, on s'approche de la valeur définitive en respectant tout le fil du bois.

J’ai pris l’habitude de caler le brin (dans la partie qui n’est pas tenue par le serre-joint) à l’aide de vieux aimants récupérés sur des haut-parleurs. La partie de l’ébauche qui était restée sous le serre-joint lors de la première approche sera taillée en dernier, généralement à la lime afin qu’il n’y ait pas le moindre risque que l’ensemble du brin "navigue" dans la gorge du gabarit.

Comme je taille toujours des brins plus longs que nécessaire, cette partie est destinée à être coupée après collage, et la précision n’y est pas très importante.

Nota : Je règle mes gabarits au delà de la valeur minimale de la tête de scion, prolongeant fictivement, de 5 à 10 centimètres selon les cas, le profil. Sans entrer dans les détails, je dirai que c’est plus pratique pour le collage des brins, au niveau des risques de rupture lorsqu’ils passent à la machine à ligaturer.

Que faire des "ratés"?

Dans la grande majorité des cas, un brin n’est pas bon parce que, par accident (arrachement des fibres le plus souvent) il est descendu en dessous de sa cote.

Si l’on peut décaler l’ensemble des brins vers le haut (en suppri­mant x centimètres en pointe), on peut rattraper. Sinon, il est souhaitable d’avoir un brin de réserve pris dans le même tronc. Canne après canne, on accumule ainsi des brins plus ou moins dépareillés.

Je les utilise, après réappairage brin par brin, pour faire des cannes en trois brins. Le raccourcissement est toujours suffisant pour qu’on puisse retailler. Le problème ne se pose, bien entendu, que pour les brins de scion, puisqu’il est toujours possible de transformer un brin de talon raté en brin de scion (mais il faut prendre les six, dans ce cas).

 

 

pecheur à la mouche en action

 

 

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Canne refendu©2007 -